Dry January : comment vivre au mieux son sevrage à l’alcool ?

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Peut-être avez-vous décidé de vous lancer dans le défi du Dry January, ce mois pendant lequel vous faites une pause dans votre consommation d’alcool ? En janvier 2023, près d’un tiers des Français envisageaient de participer à ce « challenge » selon une étude IFOP pour Freixenet-Gratien*. Cette année encore, sur les réseaux sociaux, chacun y va de son message humoristique à propos de cette expérience que l’on ne relève pas tous avec les mêmes motivations. Certains y voient l’opportunité d’éponger les excès pendant les fêtes de fin d’année quand d’autres testent leur rapport à la boisson.

Mais le Dry January peut aussi être vécu complètement en décalage par les personnes addicts à l’alcool. Comme le rappelle le ministère de la Santé et de la Prévention, « la consommation d’alcool représente un enjeu de santé publique majeur en France, où elle est à l’origine de 49 000 décès par an ». Le défi du « janvier sec » permet aussi de prendre conscience que l’addiction à l’alcool peut être plus proche de vous que vous ne le pensez. Entretien avec l’addictologue Stéphanie Ladel, qui nous donne des clefs pour aborder de manière sereine et inclusive ce défi. 

ELLE. Pensez-vous que le Dry January est une bonne initiative ? 

Stéphanie Ladel. Je fais partie de ceux qui soutiennent cette campagne depuis la première année. Je trouve que cette mise au défi est sympa, ludique, respectueuse et crée surtout un espace de liberté. L’esprit du Dry january est tout sauf d’avoir à se justifier de ce qu’on fait ou de ce qu’on fait pas. Ça doit être une expérience personnelle dans un environnement encourageant, qui est soutenant, et d’offrir un espace à ceux qui veulent essayer de faire une pause d’une semaine, un mois ou plus. 

ELLE. Ce « challenge » est-il adapté aux personnes addicts à l’alcool ? 

Stéphanie Ladel. Pour moi il y a aucun problème à essayer d’arrêter, l’important est de voir si ça nous est facile, si nous avons notre propre contrôle sur nos choix et si la pause d’alcool peut nous apporter des bénéfices palpables. Dans le cadre de la campagne du Dry January, des addictologues peuvent apporter leur soutien, chercher les meilleures stratégies pour que tout se passe bien en janvier ou après, si l’expérience révèle des difficultés qui alertent la personne qui s’est mise au défi. 

Cette personne addict est peut-être vous ou moi, ce n’est pas toujours ceux à qui on s’attend. Tant que l’on n’a pas essayé, on ne sait pas si on ne trouve pas facilement des stratégies d’arrêt. Si le diagnostic d’addiction était si facile à poser, on ne se serait pas casser la tête sur les bancs de l’école. Je pense que ça vaut le coup de se mettre au défi dans sa consommation d’alcool pour ce qu’on vient chercher :  comprendre le rapport sociologique à être poussé, à se connaître, à voir sur soi les effets mais aussi le fait de découvrir que pour certains ça se passe bien ou de découvrir que pour d’autres ou soi ce n’est pas si simple. 

ELLE. Comment réagir si on se rend compte que l’on a des difficultés à tenir le défi ? 

Stéphanie Ladel. Certaines personnes peuvent ressentir un certain mal être à ne pas boire. Leur cerveau et leur corps se sont accoutumés à cette arrivée de produits psychoactifs et ressentent des symptômes de sevrage qui sont dûs à la disparition de l’alcool dans l’organisme. On peut être de mauvaise humeur, avoir du mal à dormir. Ce sont des signes physiques plus ou moins forts comme les tremblements et les nausées qui doivent alerter. Si vous vivez ces manifestations fortes de sevrage, il est important de consulter un médecin. 

ELLE. Comment aborder le sujet avec une personne que l’on soupçonne d’avoir une addiction à l’alcool ? 

Stéphanie Ladel. Dans une situation où on se retrouve avec d’autres personnes autour d’une table, on peut déjà évoquer le challenge, en parler et se dire que ce n’est pas si bête. Même si on n’y adhère pas soi-même, simplement ne pas pousser à consommer, être silencieux par rapport au choix de l’autre, être observateur et ne pas être dans la pression sociale. Le Dry January donne les conditions les plus favorables possibles à ce que les personnes s’éloignent de leur consommation d’alcool non véritablement voulu. En consultation, on m’a déjà confié : « Je vais essayer d’arrêter mais je sais que ça ne va pas être compris par mon entourage, qu’on va essayer de me remettre un verre, qu’on ne va pas me prendre au sérieux. Parce que les gens ne savent pas que j’ai un vrai problème dont je ne peux pas parler ouvertement ». Le Dry January c’est aussi l’occasion de se demander « Est-ce qu’on est pas aussi celui qui pousse ? » 

On peut aussi former des équipes de volontaires : faire des binômes, des équipes, qui vont s’encourager pour gagner le défi en groupe et c’est une équipe qui va devoir faire corps. Le défi vécu collectivement en tant que proche de gens dont on ignore le rapport à l’alcool est aussi l’occasion de s’entraîner à aborder les choses de manière moins moralisatrice et sans humour potache qui est contre-productif. 

ELLE. Le Dry January est aussi l’occasion de parler des politiques publiques de lutte contre l’addiction à l’alcool, sont-elles suffisantes ? 

Stéphanie Ladel. Il faut des moyens pour informer en prévention mais il faut aussi plus de moyens pour épauler en soin les personnes vis-à-vis de leur consommation d’alcool, et aujourd’hui ce n’est pas encore suffisant. Bien sûr on progresse d’année en année, en tant que spécialiste sur notre façon de faire pour rendre service au plus grand nombre possible. C’est pour ça que je trouve que le Dry January est intéressant car si la société toute entière est mieux sachante, bienveillante et efficace, chacun reçoit mieux la prévention, l’éducation et les soins qu’il mérite. 

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